Paris, le 16 juin 2022 – La semaine dernière, 339 eurodéputés ont voté pour la fin du moteur thermique en Europe en 2035. La Ligue de Défense des Conducteurs s’insurge contre cette décision prônant la solution unique du 100 % électrique, prise sans mesurer ses conséquences sur la mobilité individuelle des Français au quotidien… pour un résultat écologique qui s’annonce dérisoire. Il faut faire machine arrière !
Plus qu’une étape pour que le vote imposant la fin des moteurs thermiques en 2035 soit entériné : une ultime validation qui incombera aux ministres de l’Environnement des 27 pays de l’Union européenne, le 28 juin. Rappelons que l’objectif est de réduire l’impact du transport automobile sur les émissions de gaz à effet de serre. Sauf que le résultat promet d’être anecdotique, tandis que cette décision radicale en faveur du tout électrique s’avère totalement déconnectée de la vraie vie, selon la Ligue de Défense des Conducteurs. Démonstration.
1/Une réduction des émissions de CO2 dérisoire
Sachant que 12 % des émissions de CO2 sont engendrées par les voitures particulières en Europe et que le marché automobile européen représente environ 18 % du marché mondial, la mesure concerne 18 % de 12 % des émissions mondiales de CO2, soit 2,16 %. Une vingtaine d’années étant nécessaire au parc pour se renouveler entièrement et une voiture électrique n’étant écologiquement plus “vertueuse” qu’une voiture thermique qu’à partir de 50 à 70 000 kilomètres (sa fabrication étant plus polluante), soit environ cinq ans d’utilisation, il faut donc partir de l’année 2035 visée par l’Europe, y ajouter ces cinq ans puis vingt ans, pour estimer que l’on aura, en 2060 donc, baissé de 2,16 % les émissions de CO2 au niveau mondial.
Cela signifie que chaque année, la réduction au niveau planétaire sera de l’ordre de 0,11 %, dont 0,015 % de contribution de la France. Nous avons volontairement simplifié ce calcul en imaginant que le parc ne s’électrifiera qu’à partir de 2035, alors qu’on peut supposer que de 1 % aujourd’hui, il sera passé à une proportion légèrement supérieure… Ce qui réduira d’autant « l’impact » de la mesure à compter de 2035.
2/Des ventes sous respiration artificielle
Qu’on cesse de nous parler d’engouement : la progression des ventes de voitures 100 % électriques est en effet majoritairement artificielle. Malgré la richesse de l’offre (petites, familiales, SUV de toutes tailles et même voitures de luxe, presque tous les constructeurs s’y sont mis), les seulement 12 % de parts de marché cette année ont sans aucun doute été principalement obtenus grâce aux 6 000 € de prime gouvernementale pour les voitures de moins de 45 000 €, une subvention pour le moins incitative. Reste à savoir si l’acheteur d’une Renault Zoé, s’il avait fallu débourser 32 100 € (contre 26 100 € avec l’aide de l’État) n’aurait pas plutôt craqué pour un Arkana essence, le dernier SUV en vogue de la marque, au tarif identique. Rappelons parallèlement qu’à partir du moment où il n’y aura plus que de l’électrique sur le marché, l’État n’aura plus à maintenir d’aide financière. Retour à la case départ.
3/Une dépendance chasse l’autre
Nous allons donc devenir, pour notre mobilité individuelle, dépendants d’une seule énergie. C’est, stratégiquement et économiquement, un véritable piège, qui se refermera à terme sur les consommateurs. Rappelons déjà que, chaque hiver, on nous menace de pénurie d’électricité dès le moindre coup de froid. Que se passera-t-il lorsqu’entre 18 heures et 20 heures, trente millions de voitures seront mises à recharger au moment même où des millions de foyers allumeront leur chauffage et leurs appareils électro-ménagers ?
À l’inévitable pénurie d’électricité, s’ajoute un triste paradoxe. Grâce à l’offre élargie des voitures électriques et le développement intelligent des modèles fonctionnant au gaz (il est presque impossible de faire le plein de gaz naturel en France), il serait devenu possible de ne plus dépendre que du pétrole, ni d’une énergie en particulier. Ce qui constituait un vrai progrès. Les conducteurs seront au contraire, à terme, à la merci des hausses du prix de l’électricité, sans plus aucune solution alternative. Et cela aura bien sûr aussi une incidence sur la facture de leur consommation domestique, qu’ils aient ou non une voiture. Aujourd’hui, l’État ramasse plus de 40 milliards d’euros par an grâce aux taxes sur le carburant. Il ne pourra pas se payer le luxe de s’en passer. Il faudra bien reporter ces taxes et soyons assurés qu’un jour, sans doute pas si lointain, le prix du kilomètre parcouru sera au moins aussi cher en voiture électrique qu’il ne l’est actuellement avec une voiture thermique.
4/Un effet contre-productif à plusieurs titres
Il est certain que sur les 88 % de personnes qui, aujourd’hui, n’achètent pas d’électrique, une partie (peut-être non négligeable) conservera le plus longtemps possible son modèle essence ou diesel, entrainant une chute des ventes de voitures neuves et prolongeant la vie de véhicules plus polluants. Les électriques nécessitant moins d’entretien, c’est donc toute la filière automobile française qui va souffrir, avec des dizaines de milliers d’emplois qui vont disparaître à la clé. Cette obligation du tout électrique ne prend pas non plus en compte l’éventuelle pénurie de matériaux dont l’exploitation va exploser. Carlos Tavares, le patron de Stellantis (Peugeot, Citroën, Opel, Fiat, Jeep…) évoque pourtant, déjà, un problème d’extraction de lithium dès… 2024 ! Parallèlement, cette aubaine ouvre un véritable boulevard aux constructeurs chinois : grâce à la volonté d’aider les voitures électriques, ceux-ci, dont les moteurs thermiques ne sont pas aux normes européennes, trouvent ici une belle porte d’entrée. MG, Aiways ou encore Link & Co n’auraient pas posé leurs roues en France sans les aides de l’État. Même la Dacia Spring, best-seller actuel du marché électrique français, est fabriquée en Chine…
Les ministres européens de l’Environnement feront-ils appel au bon sens avant de rendre leur décision, afin que les Français ne se retrouvent pas prisonniers d’un diktat voté par 339 eurodéputés qui ne pensent pas plus loin que le bout de leur bureau ? Ces 0,015 % d’émissions de CO2 en moins, à l’échelle de notre pays, peuvent certes apparaître comme un (tout petit) premier pas. Mais au prix de tellement de sacrifices et de contraintes qu’il semblerait plus raisonnable, selon la Ligue de Défense des Conducteurs et au vu du carnage qui se prépare sur les marchés automobiles, que cette loi absurde soit modifiée, éventuellement reportée, et s’ouvre au moins aux modèles hybrides.
Pour en savoir plus :
Ligue de Défense des Conducteurs
Alexandra Legendre
Responsable Pôle Études et Communication
01 43 95 43 00/06 37 85 26 06
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