Radars de vitesse : marge "d’erreur" oui, "de tolérance", non !

Contrairement au vocabulaire utilisé usuellement lorsqu’il est question des contrôles de vitesse par des radars automatiques, la « marge de tolérance » n’existe pas et ces engins de contrôle n’en font guère preuve. Explications.

Le terme « marge de tolérance », utilisé pour désigner la différence entre la vitesse réelle d’un véhicule et celle « retenue » lors d’un excès, est largement usurpé : il s’agit en réalité d’une « marge technique » ou « d’erreur ». En principe, celle-ci est indiquée pour chaque appareil de mesure, dans le but de connaître la précision de l’erreur qui pourrait être faite par l’appareil en question. En métrologie (soit la science de la mesure), une erreur de mesure représente la différence entre la valeur mesurée d'une grandeur et une valeur de référence[1].

Les radars, ou plus scientifiquement « cinémomètres », utilisés dans le cadre des contrôles de vitesse automatiques (ou réalisés par les forces de l’ordre sur le terrain), ne dérogent pas à cette règle : une marge d’erreur est appliquée à la vitesse mesurée par cet instrument pour compenser les éventuelles imprécisions de celui-ci. Ceci explique pourquoi, sur une route dont la vitesse maximale autorisée (VMA) est de 80 km/h, il est possible que vous ne soyez pas sanctionné, alors que la vitesse réelle mesurée de votre véhicule est de 84 km/h : si la marge d’erreur du radar est de 5 km/h, la vitesse retenue sera de 79 km/h donc, pas de PV à l’horizon !

 

Marge d’erreur des radars : que dit la loi ?

Ces radars sont contrôlés et vérifiés chaque année pour que leur marge d’erreur corresponde toujours à la règlementation en vigueur (article 6 de l’Arrêté du 4 juin 2009 relatif aux cinémomètres de contrôle routier[2]). Ce même arrêté stipule que « la grandeur à mesurer est la vitesse de déplacement des véhicules. Les cinémomètres doivent indiquer directement la vitesse des véhicules en kilomètres par heure (km/h) » (article 3).

Ce texte de loi distingue deux cas parmi les radars : les cinémomètres à poste fixe et les cinémomètres installés dans un véhicule en mouvement.

 

1. Les cinémomètres à poste fixe

Pour eux, les erreurs maximales tolérées sont de plus ou moins 5 km/h, pour les vitesses mesurées inférieures à 100 km/h et de plus ou moins 5 % de la vitesse mesurée, pour celles qui sont égales ou supérieures à 100 km/h. Les radars fixes installés le long des routes (classiques, double sens, tourelles mais aussi autonomes) sont notamment concernés. Pour ces radars à poste fixe, la marge d’erreur est fixée à + 5 km/h ou + 5 % de la vitesse réelle du véhicule et est retranchée systématiquement de la vitesse mesurée pour établir la vitesse retenue. Ainsi, sur une portion de route comportant une VMA de 80 km/h, un conducteur commettra une infraction à la vitesse lorsque son véhicule sera réellement mesuré, par un radar à poste fixe, avec une vitesse de 86 km/h, ce qui correspondra à une vitesse retenue (en retranchant la marge d’erreur) de 81 km/h (voir tableau 1).

 

2. Les cinémomètres installés dans un véhicule en mouvement

Pour eux, les erreurs maximales tolérées sont de plus ou moins 10 km/h, pour les vitesses mesurées inférieures à 100 km/h et de plus ou moins 10 % de la vitesse mesurée, pour celles égales ou supérieures à 100 km/h. Les dispositifs installés dans les voitures-radars circulant sur les routes (conduites par les forces de l’ordre ou des chauffeurs privés) sont concernés. Pour ces radars installés dans un véhicule en mouvement, la marge d’erreur est fixée à + 10 km/h ou + 10 % de la vitesse réelle du véhicule et est retranchée systématiquement de la vitesse mesurée pour établir la vitesse retenue. Ainsi, sur une portion de route comportant une VMA de 80 km/h, un conducteur commettra une infraction à la vitesse lorsque son véhicule sera réellement mesuré, par un système installé dans un véhicule en mouvement, avec une vitesse de 91 km/h, ce qui correspondra à une vitesse retenue (en retranchant la marge d’erreur) de 81 km/h (voir tableau 2).

 

Les « vitesses minimales réelles caractérisant un excès de vitesse » sont données à titre indicatif car elles peuvent dépendre de la marge d’erreur du compteur de votre véhicule ou de l’aide à la conduite utilisée. Donc, si vous flirtez avec celles-ci, vous pourriez avoir la mauvaise surprise de vous retrouver pris en photo par un radar toujours aussi zélé, alors prudence parce qu’eux ne feront pas preuve de tolérance.

 

Les obligations légales que doit remplir un radar : à avoir en tête pour lire un PV

Au-delà de cette marge d’erreur, l’Arrêté du 4 juin 2009 relatif aux cinémomètres de contrôle routier pointe d’autres obligations liées à l’utilisation des radars de contrôle routier.

Ainsi, l’article 7 stipule que les systèmes de contrôle doivent porter une plaque d’identification comprenant notamment le nom du fabricant, le numéro de série, le numéro et la date du certificat d’examen, l’étendue de mesure et la portée maximale à laquelle l’instrument peut effectuer une mesure.

Concernant la vérification de ces dispositifs, celle-ci intervient lors de l’installation (article 18) puis annuellement ou tous les deux ans selon certaines conditions (article 20).

Selon l’article 25, chaque radar doit être accompagné d’un carnet métrologique (sur le lieu d’utilisation du cinémomètre) comportant « les informations relatives  à l’identification de l’instrument et ses dispositifs complémentaires, aux contrôles métrologiques, aux entretiens et aux réparations ». L’annexe II de cet arrêté précise les renseignements que doit comporter le carnet métrologique. Parmi ces informations sont notamment répertoriées :

« - la marque, le type, le numéro de série du cinémomètre ;

   - l’identification de l’entité qui effectue la vérification ;

   - la date et le lieu de réalisation de la vérification ;

   - la décision prononcée à l’issue de la vérification ;

   - la description du site d’installation, comprenant notamment le lieu, le nombre de voies de circulation couvertes par l’instrument, le ou les sens de circulation pour lesquels les mesures sont effectuées (éloignement, rapprochement, ou les deux) ;

   - la date de l’intervention, l’identification du réparateur et l’objet et l’étendue de la réparation (pour une réparation) »

Les utilisateurs des radars ont également des obligations (article 26). Ils doivent faire réaliser les vérifications périodiques en plus de celles effectuées lors de l’installation ou des réparations, mais aussi « s’assurer du bon état réglementaire de leurs instruments, notamment du maintien de l’intégrité des scellements, de la marque de vérification primitive et des marques de contrôle en service ; maintenir l’intégrité du carnet métrologique, le tenir à la disposition des agents de l’Etat chargés du contrôle des instruments de mesure et veiller à ce que les différents organismes intervenant sur l’instrument le remplissent ; mettre hors service les instruments réglementairement non conformes ».

Attention, ces éléments semblent tout de même compliqués à obtenir pour un citoyen lambda. Mais pour les cas les plus graves, un avocat spécialiste du droit routier pourrait s’en saisir pour essayer de limiter les sanctions.

 

Étant donné le nombre important de radars en service (4 400 en France*) dont 1 000 radars fixes, 400 discriminants, 480 embarqués, 250 autonomes, 62 tronçons, 450 de feux rouges, 78 de passage à niveau, 480 voitures radars et 1 200 tourelles), toutes ces données sont à garder en mémoire lorsque vous prenez la route ou que vous examinez un PV pour excès de vitesse. Ils pourraient vous aider (avec l’aide d’un avocat ou non) à l’éviter ou le contester et ainsi protéger votre permis de conduire et votre portefeuille. Et retenez bien qu’en matière de mesure de la vitesse, la différence entre la vitesse retenue et la vitesse réelle du véhicule est due à la marge d’erreur du radar et non pas d’une quelconque tolérance de la part de cette simple boîte métallique équipée d’un appareil photo. La tolérance reste l’apanage de l’être humain !

 

Les données présentées dans les tableaux ci-dessus sont purement informatives et ne sont pas des éléments juridiques permettant la contestation d’un PV.

* 4 400 radars sont ou seront installés en France durant l’année 2020 dont 1 000 radars fixes, 400 discriminants, 480 embarqués, 250 autonomes, 62 tronçons, 450 de feux rouges, 78 de passage à niveau, 480 voitures radars et 1 200 tourelles.

[1] Vocabulaire international de métrologie - Concepts fondamentaux et généraux et termes associés, BIPM, 2008.

[2] Arrêté du 4 juin 2009 relatif aux cinémomètres de contrôle routier.