Dégradation de l’état des routes : le dérèglement climatique a bon dos

En ce début de printemps 2024, la dégradation de notre réseau routier fait l’actualité. Si le constat de son piteux état, vous le faites tous les jours en voiture ou en deux-roues, un rapport de l’Office national des routes l’entérine désormais officiellement. Mais de là à mettre les nids-de-poule et autres fissures sur le dos du réchauffement climatique, de notre côté, on trouve ça gonflé… Car le manque d’entretien et les finances publiques à sec nous semblent bien plus fautifs.

C’est le « scoop » du moment : selon un rapport de l’Office national des routes (ONR) tout juste publié, près de 20 % de notre réseau routier est « en très mauvais état ». Un constat alarmant qui fait la Une de l’actualité, mais qui n’est guère surprenant pour la Ligue de Défense des Conducteurs, comme nous l’avons fait savoir à la télé, à la radio ou encore dans la presse papier et web. Ce qui nous étonne en revanche, c’est de voir placer le changement climatique en tête des « responsables ».

Si les médias pointent en effet du doigt le dérèglement climatique comme principal coupable de cette détérioration, notre analyse approfondie du rapport publié par l’ONR révèle une réalité bien plus complexe. Certes, les pluies diluviennes ou les longues périodes de forte chaleur n’arrangent pas les choses. Mais il apparait que le désengagement de l’État dans l’entretien des routes, le déficit de compétences techniques à l’échelle locale et le manque de financement public constituent des facteurs qui pèsent bien plus lourd dans la multiplication des nids-de-poule, fissures et autres défauts de la route… Or, c’est bien ce constat auquel nous aussi, à la Ligue de Défense des Conducteurs, sommes parvenus, notamment dans notre étude intitulée « Dégradation des routes en France : il est urgent d’agir », publiée en octobre 2020.

Pourtant, maintenir un réseau routier pérenne est une nécessité « non négociable » en France. « Les infrastructures routières sont le support principal des mobilités des Français », rappelle Claude Riboulet, président de l’Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité (IDDRIM, maison-mère de l’ONR*). Il est donc impératif de prendre des mesures concrètes pour remédier à cette situation. Accorder un budget adéquat aux collectivités territoriales (et notamment les communes, en grande détresse), faire appel à des spécialistes pour conseiller les élus locaux et garantir un suivi rigoureux des travaux par des auditeurs indépendants sont des étapes indispensables pour que la France retrouve sa place de n°1 pour la qualité de ses infrastructures routières, qu’elle a occupée dans le monde jusqu’en 2012 (elle est désormais 18e, selon un classement du World Economic Forum).

À la Ligue de Défense des Conducteurs, nous sommes loin de rester les bras croisés. Rappelons que si elles occupent une place marginale dans la politique de sécurité routière en France, les infrastructures routières jouent un rôle prédominant dans l’accidentologie. En effet, dans 30 % des accidents mortels, elles apparaissent comme l’un des facteurs en cause… C’est pourquoi nous avons créé notre plateforme de signalement de zones dangereuses, Activ’Route. Entre le site (www.activroute.org) et l’appli téléchargeable gratuitement sur les smartphones, nous invitons tous les conducteurs à devenir acteurs de la sécurité routière, en identifiant tous les défauts de la route qui leur apparaissent comme susceptibles de provoquer un accident. À nous ensuite de transférer les signalements qu’ils nous font parvenir aux gestionnaires de voirie concernés… et de nous assurer que le « problème » aura bien droit à toute leur attention. Pour comprendre le fonctionnement d’Activ’Route, cliquez ici. Nous avons d’ailleurs noté que grâce à la forte médiatisation dont nous avons bénéficié à l’occasion de la publication du rapport de l’ONR, le nombre de « dossiers » que nous devons traiter a bondi !

En attendant (longtemps ?) que l’état des routes redevienne une réelle préoccupation de nos hauts dirigeants politiques, n’hésitez pas à rejoindre notre communauté d’Activ’Routeurs. Car tous ensemble, nous devons préserver notre droit à circuler librement sur des routes en bon état.

* L’IDRRIM (Institut des Routes, des Rues et des Infrastructures pour la Mobilité) fédère l’ensemble des acteurs publics et privés de la communauté des infrastructures de transport. Son objectif est de proposer des solutions aux problématiques que peuvent rencontrer ces acteurs afin d’avoir une meilleure homogénéisation du réseau routier. Le rapport se base sur un échantillon de 64 départements et de 6 métropoles, soit environ 267 000 kilomètres de voirie. Pour rappel, sur les 1,1 million de kilomètres de routes que compte notre pays, 705 000 km sont gérés par les communes, 378 900 par les départements, 9 300 par les sociétés concessionnaires d’autoroutes et… 11 600 par l’État (source : Union routière de France).