Zones à faibles émissions : un demi-million de conducteurs pourraient perdre leur emploi pour cause de restrictions de circulation !

Paris, le 12 février 2025 – La montée en puissance des Zones à faibles émissions depuis le 1er janvier 2025 menace aujourd’hui très concrètement l’emploi d’un demi-million de salariés, selon les estimations de notre association. Leur faute : être dans l’incapacité financière de troquer leur vieille voiture contre une plus récente, pour pouvoir continuer à rouler dans la ZFE où se trouve leur entreprise. Sachant que s’ils ne respectent pas les niveaux de restriction de circulation symbolisées par les vignettes Crit’Air, ce sont les PV à répétition qui leur pendent au nez… à très courte échéance.

« Notre petit-fils a enfin trouvé un travail en décembre. Il lui fallait une voiture pour y aller. On l'a aidé, et il a pu s'acheter une occasion à 2 000 €. Mais maintenant, on lui dit que l'entreprise est dans une "ZFE" et qu'avec cette voiture, il n'a plus le droit d'y aller. C'est révoltant.
On ne demande rien. Tout ce qu'on veut, c'est qu'on nous laisse travailler et gagner notre vie honnêtement. Mais ça, ceux qui font les lois n'en n'ont rien à faire. »

Ce poignant témoignage d’Yvette, sympathisante de la Ligue de Défense des Conducteurs, n’est qu’un parmi tant d’autres. Tous liés à la crainte de perte d’emploi (ou de ne pouvoir répondre positivement à une proposition), pour cause de véhicule trop ancien pour être toléré dans l’une des 43 Zones à faibles émissions (ZFE) dont la mise en place s’est accélérée, le 1er janvier dernier.

Depuis cette date en effet, des millions de conducteurs sont devenus indésirables dans ces métropoles de plus de 150 000 habitants, qu’ils y résident ou pas. Leur tort : être propriétaires d’une voiture dont la vignette Crit’Air trahit un âge trop avancé (selon les villes, le niveau de restriction de circulation touche les numéros 3, 4, 5 et NC).

Nous sommes de plus en plus nombreux à dénoncer l’injustice sociale de cette mesure, qui fait naître un nouveau délit de pauvreté. Toutefois, le maintien de l’accès à l’emploi reste à ce jour un sujet peu exploré. À la Ligue de Défense des Conducteurs, nous nous sommes donc attelés à évaluer cette menace qui plane sur les salariés circulant dans les ZFE et dans l’incapacité financière de remplacer leur vieux véhicule.

Première étape : calculer le nombre de « travailleurs bannis », dont le véhicule est trop ancien pour circuler dans les ZFE

Nous nous sommes d’abord appuyés sur l’étude publiée en août 2024 par l’association Apur, qui analyse les véhicules et publics impactés par l’étape Crit’Air 3 dans le Grand Paris. Nous avons isolé les 2,13 millions de véhicules qui circulent du lundi au vendredi dans la métropole (les salariés du week-end étant compensés par les « simples » visiteurs des jours de semaine). Parmi eux, 27 % ont été identifiés comme porteurs de vignettes Crit’Air 3, 4, 5 ou NC, celles-là même qui sont blacklistées depuis le 1er janvier 2025. Les observations de terrain ayant été réalisées en juin 2022, nous avons ramené ce pourcentage à 23 %, pour tenir compte de l’évolution du parc depuis.

On obtient 490 000 véhicules. Soit un gros 30 % des 1,66 million de voitures particulières et véhicules utilitaires légers que compte l’aire d’attraction[1] de la ZFE du Grand Paris.

Ce taux de 30 %, nous l’avons appliqué aux autres ZFE refusant désormais d’accueillir les Crit’Air 3 et plus (Lyon, Grenoble et Montpellier). Puis, aux ZFE excluant les Crit’Air 4, 5 et NC (Strasbourg, Reims, Rouen, Toulouse…). Nous n’avons pas retenu les ZFE refusant leur accès aux Crit’Air NC, le parc concerné étant peu représentatif.

Total :

  • 687.000 "travailleurs bannis" dans les ZFE excluant les Crit'Air 3 et +
  • 98.000 "travailleurs bannis" dans les ZFE excluant les Crit'Air 4, 5 et NC

Deuxième étape : évaluer, parmi ces « travailleurs bannis », ceux qui n’ont pas les moyens de changer de voiture

En 2022, une étude réalisée par l’Institut CSA pour l’association Eco Entretien révélait que 36 % des Français n’avaient pas le début d’un euro pour changer de véhicule. Et 27 % ne pouvaient mettre plus de 3 990 euros… Or, à ce tarif, les Crit’Air 2 (et que dire des Crit’Air 1, encore plus récentes) sont d’authentiques raretés !

Si l’on additionne ces deux pourcentages, on obtient 63 % de citoyens pour qui un modèle Crit’Air 1 ou 2 est donc quasi inaccessible. Soit près de 433 000 personnes parmi les 687 000 « travailleurs bannis » dans les ZFE excluant les Crit’Air 3 et plus. Pour les ZFE excluant les Crit’Air 4, 5 et NC, nous n’avons retenu que les 36 % qui n’avaient pas le début d’un euro. Soit 35 000 personnes sur 98 000.

Au total, nous obtenons ainsi près d’un demi-million de salariés (468 000 exactement selon nos estimations) risquant de perdre leur emploi pour cause de véhicule exclu des ZFE. Et c’est sans compter tous ceux qui seront dissuadés de prendre un job dans une zone où les exigences des ZFE les placent sous la menace de PV à 68 € (majorés à 180 €) pour non-respect des restrictions de circulation, lesquels pleuvront à compter de 2026 ! « Aux arguments d’injustice sociale que nous ne cessons d’évoquer lorsque nous demandons un report de cinq ans du calendrier d’application des Zones à faibles émissions, cette nouvelle dimension liée à l’accès à l’emploi nous semble encore plus révoltante », s’indigne Nathalie Troussard, Secrétaire générale de la Ligue de Défense des Conducteurs. Notre association se mobilise depuis longtemps pour que cette mesure en faveur de la transition écologique embarque tous les Français, et pas seulement les plus aisés. Aujourd’hui, nous alertons sur les risques que la mise en place des ZFE font peser sur l’emploi. Nous espérons que nos élus finiront par prendre les décisions qui s’imposent ».

 

[1] Aire d’attraction : depuis 2020, ce zonage utilisé par l’INSEE « définit l’étendue de l’influence d’une ville sur les communes environnantes », à partir de critères de densité de population, de population totale et d’emploi (source : INSEE).

 

Pour en savoir plus :

Contact presse

Ligue de Défense des Conducteurs, Alexandra Legendre : 06 37 85 26 06

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