Stimulés par les plus de 100 000 messages d’interpellation des sympathisants de la Ligue de Défense des Conducteurs, ce sont 125 députés qui viennent de défendre à l’Assemblée nationale des amendements au Projet de loi de Finances destinés à améliorer l’entretien des routes par les communes, en utilisant pour cela l’argent prévu pour la politique du tout-radar. Le recours au 49.3 par le gouvernement n’aura malheureusement pas permis à ces amendements d’aboutir, mais la mobilisation n’aura pas été vaine puisque de plus en plus de députés, d’horizons politiques différents, ont souhaité une suppression partielle ou totale des dépenses dans les radars.
Près de 200 millions d’euros ! C’est la somme que le gouvernement a prévu d’investir dans les radars en 2023, pour les entretenir et en acheter de nouveaux. Aussitôt, le député (LR) des Ardennes Pierre Cordier a déposé un amendement au Projet de loi de Finances pour réaffecter ce budget à l’entretien des routes. La Ligue de Défense des Conducteurs a naturellement souhaité lui apporter son soutien, ainsi qu’aux très nombreux autres amendements allant dans le même sens et déposés par des députés de plusieurs groupes politiques. Nous avons donc mobilisé nos sympathisants en leur proposant de solliciter leur député, grâce à notre pétition « Moins de radars ! », signée et diffusée par internet et par La Poste.
En trois vagues successives d’interpellations, c’est un total de 105 000 messages envoyés aux parlementaires. Un raz-de-marée dont nous remercions tous les Français qui ont vu en notre pétition un moyen d’exprimer leur mécontentement face aux priorités de l’État.
La France a besoin de routes de qualité
Rappelons que bien plus que les radars, un réseau routier bien entretenu constitue un élément-clé de notre sécurité. Dans 30 % des accidents mortels, en effet, le facteur infrastructure (nid-de-poule, absence de rail de sécurité, défaut de signalisation…) est impliqué.
Pourtant, la France ne figure plus qu’à la 18e place du classement mondial établi par le World Economic Forum, consacré à la qualité des infrastructures routières, alors qu’elle en tenait encore le premier rang en 2012… En octobre 2020, notre association avait d’ailleurs pointé du doigt l’ornière dans laquelle plongeait notre pays, en la matière, dans une étude intitulée "Dégradation des routes en France : il est urgent d’agir"
Ces divers amendements au Projet de loi de finances 2023 ne pouvaient donc mieux tomber…
Un projet qui rassemble les députés au-delà des clivages partisans
La preuve, de nombreux parlementaires, ainsi sollicités par les sympathisants de la Ligue de Défense des Conducteurs, ont manifesté sans détour leur intérêt pour ces propositions demandant la réaffectation de ces 200 millions d’euros aux routes plutôt qu’aux radars.
C’est le cas de Florian Chauche, député (LFI-NUPES) du Territoire de Belfort, qui déclare dès le 7 octobre : « en accord avec le programme de l’Avenir en commun je voterai pour une diminution des fonds alloués aux radars automatiques. En effet, le groupe France insoumise – NUPES souhaite réduire le nombre de radars automatiques et limiter leur présence aux zones accidentogènes. En outre, nous souhaitons que l’argent économisé soit utilisé pour permettre un déploiement plus important des forces de l’ordre sur les zones les plus dangereuses et pour lutter contre les comportements à risques de certains conducteurs et certaines conductrices. »
De même, le 11 octobre, Emmanuel Fernandes, député (LFI-NUPES) du Bas-Rhin, nous fait connaître son point de vue : « Notre position concernant les radars est claire : il faut diminuer le nombre de radars fixes en ne finançant pas de nouvelles implantations de radars et privilégier des radars pédagogiques, des feux intelligents et la sensibilisation sur le sujet des risques liés à la vitesse. »
De nombreux députés Les Républicains ont également soutenu l’amendement de Pierre Cordier, en le cosignant ou en indiquant leur intention de le voter. Par exemple, Francis Dubois, député de la Corrèze, souligne, le 13 octobre, que « ces crédits réaffectés permettront ainsi aux collectivités de financer des aménagements des zones accidentogènes et de mieux entretenir le réseau routier secondaire. » Dans le même esprit, Hubert Brigand, député de Côte-d’Or, se dit « très intéressé » par ce projet.
Déposé le 10 octobre par le député (RN) du Var Philippe Lottiaux, un autre amendement (no II-CF2) visait quant à lui à réaffecter aux collectivités locales la moitié du budget destiné aux radars, soit 100 millions d’euros. Dans une démarche identique, la députée de la Marne Anne-Sophie Frigout déclare : « cette réduction de 100 millions d’euros cible tout particulièrement les radars spécifiques aux Zones à Faibles Émissions. ».
Une nouvelle approche de la sécurité routière fait son chemin
Si une mobilisation de députés de tous horizons a accompagné ces divers amendements à l’objectif identique, à la Ligue de Défense des Conducteurs on s’étonne néanmoins que l’essentiel des signataires proviennent des groupes Les Républicains et Rassemblement National, sur un sujet qui n’a pourtant aucune vocation à être « marqué politiquement », puisqu’il s’agit d’une mesure visant à remettre la dégradation de l’état des routes au centre du débat public.
Malheureusement, la Première ministre Élisabeth Borne a décidé de mettre en œuvre à plusieurs reprises l’article 49.3 de la Constitution pour faire passer une partie du budget, enterrant tout espoir de voir l’un de ces amendements discutés. Ce qui n’a pas manqué d’agacer le député (RN) de l’Ain Jérôme Buisson, pour qui cette décision « prive les représentants de la Nation de tout droit d’amendement et même de regard. Aucun contrôle parlementaire n’a donc été possible sur ces crédits. Ceci est à ajouter au refus du Gouvernement de baisser de façon pérenne les taxes qui pèsent sur les carburants et aux zones à faibles émissions qui vont exclure la totalité des véhicules diesel et la plupart des véhicules essence donc une grande partie de nos compatriotes de nos villes. » Malgré tout, la Ligue de Défense des Conducteurs compte sur le Sénat pour replacer prochainement au cœur de l’action législative la question du financement lié à l’entretien des routes. Alors que le sujet a mobilisé 125 députés cette année (+ 200 % par rapport au PLF 2022 !), nous sommes convaincus d’être bientôt enfin entendus.
Liste des députés ayant signé au moins un amendement demandant une suppression partielle ou totale des dépenses dans les radars