La nouvelle lubie de nos experts en sécurité routière : les platanes, en bordure de nos routes, constitueraient un danger. Faut-il en rire ou en pleurer ? Un billet signé Georges Ayache, avocat spécialisé dans la défense des automobilistes et administrateur de l'Automobile Club des Avocats.
L’histoire qui rappelle un vieux film des Marx Brothers : le tabouret du musicien étant trop éloigné du piano, Groucho s’échine à rapprocher … le piano.
On y est presque aujourd’hui avec cette nouvelle "réflexion" sur la "lutte contre la violence routière", ainsi qu’il est convenu d’appeler désormais ce que naguère on dénommait bien innocemment l’amélioration de la sécurité sur nos routes.
Mais il faut faire fort, marquer sa détermination, "donner des signaux" comme on dit de nos jours et surtout, rassurer les sacro-saintes "associations" (sous-entendu les bonnes, celles qui vénèrent le principe de précaution jusqu’à l’absurde, pas ces associations d’automobilistes qui sont tenues pour de nouvelles ligues fascistes).
Le grotesque, on le sait, n’en a jamais effrayé certains. On s’y ébroue aujourd’hui allègrement avec cette proposition/projet/hypothèse/piste de recherche à l’attention des collectivités locales consistant à dénoncer un nouveau facteur accidentogène : l’arbre.
Eh oui, il fallait y penser ! Les platanes qui bordent certaines de nos routes ne seraient rien moins que des ennemis contre lesquels il faudrait se prémunir ou encore, pour mieux dire, se gendarmer. Un ennemi singulièrement chafouin, qui sait si bien se fondre dans le décor, s’allier l’esthétique et se cacher derrière l’alibi de la longévité. Quelques-uns de nos platanes, en effet, n’étaient-ils pas déjà là au temps de Louis XIV ? Mais qu’importe, il faut ce qu’il faut quand on se targue de modernité !
Il faut cependant être équitable. Cela fait déjà bien longtemps que le platane est devenu un "marronnier" si l’on ose dire, à savoir un de ces sujets qui resurgissent d’une façon sempiternelle tel le serpent de mer. Il y a quelques années, Jean Glavany, alors ministre de l’agriculture, désignait déjà les platanes comme un "danger public". La présidente de l’Asppar (Association pour la protection des arbres en bord de routes) Chantal Fauché (cela ne s’invente pas) était alors au bord de la crise de nerfs. Avec les intentions actuelles de Manuel Valls, nul doute qu’elle devra bientôt repiquer au Lexomyl. C’est sans fin.
Le dernier argument en date ? En 2013, 326 personnes seraient mortes après avoir percuté un arbre, soit 10% du total des tués sur nos routes. Ce n’est pas rien, il est vrai. Pourtant, jusqu’à preuve du contraire, un arbre, quelle que soit sa variété, est un corps inerte … de même que les poteaux électriques, les poteaux de signalisation, les murets, les glissières métalliques, les murets ou encore les véhicules stationnés. Plus du tiers des accidents mortels sur nos voies impliquent des obstacles fixes. Faut-il aussi bien interdire ces obstacles au motif qu’ils mettraient en péril nos automobilistes ? Faudra-t-il également, une fois tout obstacle intempestif éradiqué, pratiquer des zones de sécurité d’une vingtaine de mètres de chaque côté des chaussées, quitte à transformer celles-ci en circuits de Formule 1 ?
Encore une fois, on prend le problème de la sécurité routière à l’envers à force de chausser la lorgnette idéologique ou/et démagogique au détriment de la simple logique. Après tout, objecterait le simple bon sens, si un automobiliste percute un platane, ce n’est pas la faute de l’arbre implanté à cet endroit mais bien celle du véhicule qui aura pu avoir une défaillance mécanique ou, plus sûrement encore, la responsabilité du conducteur qui n’aura pu ou su rester maître de son véhicule. Dans la tragique affaire de l’Airbus de la Lufthansa, se serait-on donné le ridicule d’accuser la montagne de s’être trouvée là au moment du crash fatal ?
Mais rien n’arrête décidément nos forcenés du cocooning social extrême : 30km/h dans nos agglomérations, éradication des végétaux au bord de nos routes. Qu’est-ce qui émergera demain de leur imagination technocratique sans limite ? On n’ose y songer. Leur a-t-on dit qu’une route absolument dégagée, de même qu’une vitesse excessivement basse, est plutôt de nature à endormir la vigilance des automobilistes ? Leur a-t-on objecté que les arbres, loin de représenter un danger, peuvent permettre au contraire de mieux appréhender la route en fournissant des repères de distance ou de vitesse, et en rendant son tracé globalement plus lisible ?
Il est vrai que de telles considérations présentent l’inconvénient de rendre la réflexion beaucoup plus sophistiquée et contradictoire. Le simplisme est tellement moins fatigant !
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Je veux conserver mon permis de conduire (25 questions-réponses pour me défendre), préfacé par Christiane Bayard, secrétaire générale de la Ligue de Défense des Conducteurs.
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