Il est adepte de l’amour vache, Emmanuel Macron. D’un côté il déclare sa flamme à l’automobile en direct à la télé et de l’autre, il ne renonce à aucune des taxes qui étouffent le pouvoir d’achat des huit Français sur dix qui utilisent leur voiture au quotidien… À la Ligue de Défense des Conducteurs, on se demande ce qui se passerait s’il ne l’aimait pas, « la bagnole »...
Depuis quelques semaines et face à la hausse du prix des carburants, notre association est régulièrement sollicitée par les médias pour s’exprimer sur la part des taxes sur un litre d’essence ou de gazole. « Et vous, à la LDC, est-ce que vous demandez qu’on baisse la TVA ? La TICPE ? » Tu m’étonnes qu’on voudrait payer moins de taxes. Mais dans un pays dont le déficit public dépasse les 3 000 milliards d’euros, a-t-on la moindre chance d’être entendus ? La réponse, Emmanuel Macron l’a donnée « en même temps » que sa déclaration d’amour à « la bagnole ». « Est-ce qu’on peut réduire les taxes qui permettent de financer la transition écologique, soit 32 milliards d’euros en 2023 et 40 milliards en 2024 ? » À sa question auto-formulée, il répond aussitôt : « Non ! » Au passage, notons qu’il a enterré la proposition de sa Première ministre quelques jours, enjoignant les distributeurs à vendre leur carburant à perte. Une simple « menace » qui pend désormais au nez des raffineurs tentés d’encaisser des « marges abusives » alors que le prix du baril du brut s’envole, lui aussi.
Et nous là-dedans alors ? On récupère les miettes. La vente à prix coûtant, à laquelle concèdent les grandes enseignes ? Ces quelques centimes grappillés sur un plein ne vont pas changer notre vie. Le nouveau chèque carburant de 100 euros par mois et par voiture, auquel pourront prétendre cinq millions de foyers, représente quant à lui 20 centimes par litre d’économie pendant six mois pour un conducteur moyen (12 000 kilomètres parcourus par an, avec un véhicule consommant environ 6,5 litres de carburant aux 100 km). Toujours bon à prendre, à condition que les Français soient bien informés de cette mesure et que les démarches administratives ne soient pas dissuasives. Mais pour ces citoyens au budget hyper restreint, ce n’est malheureusement pas cette aumône qui les embarquera dans la transition écologique.
Pendant ce temps, Bercy fait pleurer dans les chaumières en expliquant que si, en 2022-2023, l’inflation a bien fait rentrer 4 milliards d’euros de plus dans les caisses de l’État rien que pour les achats de carburant (via la TVA), seule 50 % de cette somme lui reviendra. Et celle-ci ne compense pas les 7,5 milliards d’euros qu’a coûtés la ristourne de 15 centimes sur l’essence concédée fin 2022, auxquels il faut ajouter les 500 millions d’euros du premier chèque carburant émis en début d’année. En effet, comme gestion du budget en bon père de famille, on a vu mieux. Toutefois, selon l’analyse de la situation à laquelle ont procédé les journalistes de la rubrique Checknews de Libération, « le surplus de TVA [en 2023] rapport[era] davantage que l’indemnité carburant pour les travailleurs ». À voir ce que l’État fera de cette « cagnotte »…
Enfin, dernière déclaration d’amour en date envers « la bagnole », la taxe sur les infrastructures de transport de longue distance, figurant dans le Projet de loi de finances 2024 tout juste dévoilé. Les Français vont aimer : en gros, il s’agit notamment de faire passer à la caisse les sociétés concessionnaires d’autoroutes pour compenser leurs super profits. Mais promis juré, s’avance Bruno Lemaire, les « compagnies d’autoroute ne seront pas autorisées à répercuter l’augmentation sur les péages ». La satisfaction des usagers a pourtant été de courte durée, puisque Vincent Coppey, big boss de Vinci Autoroutes, s’est fendu d’un communiqué à l’AFP dans la foulée : « Une hausse des taxes c'est inévitablement une hausse des tarifs des péages ». Ça sent le bras de fer viril entre les sociétés d’autoroutes et le ministère de l’Économie et des Finances. Sauf qu’entre leurs deux gros poings musclés, les usagers se retrouvent littéralement écrabouillés…
Finalement, on aimerait qu’Emmanuel Macron « adore la bagnole » un peu moins. Parce que dans le genre « qui aime bien châtie bien », sans même aborder le prix des voitures qui s’affole, le malus CO2 et le malus au poids qui s’alourdissent en 2024, la répression routière automatisée dont l’objectif d’amélioration de la sécurité routière s’éloigne à vue d’œil ou encore les routes qu’on laisse se dégrader, nous, les conducteurs, on va finir par porter plainte pour maltraitance.