« Le mauvais état des pneumatiques est responsable de 6 % des accidents mortels en Europe chaque année »

Plutôt que nous noyer sous les radars automatiques, l’État ferait bien mieux de sensibiliser les conducteurs à de vrais sujets de sécurité routière. Une mission que notre association endosse au quotidien… Aujourd’hui, ainsi, on vous parle pneus. Rappelez-vous que notre vie peut dépendre de l’état de ces petites bandes de caoutchouc ! Jean-Denis Perche, fondateur de CaRool, start-up française spécialisée dans la gestion et la maintenance des pneumatiques, explique comment détecter si les vôtres sont toujours bons pour le service. Vous verrez, c’est très facile… La preuve, on vous offre la possibilité de vérifier par vous-même.

Quel rôle jouent les pneus sur notre sécurité sur la route ?

J’ai l’habitude de dire que la surface de contact de nos pneus avec la chaussée correspond à la taille de quatre cartes postales. Alors ces toutes petites cartes postales, il est impératif qu’elles soient de bonne qualité… Notre expérience nous enseigne que c’est rarement un bon calcul d’économiser sur ce poste de dépense.

Que risque-t-on concrètement à rouler avec des pneus usés ?

Tout d’abord, en cas de contrôle par les forces de l’ordre, vous pouvez faire l’objet d’une amende de 135 euros. Par ailleurs, dans 5 % des contrôles techniques, l’état dégradé des pneus contraint à une contre-visite. Ça fait quand même 1 million de conducteurs concernés ! Mais le risque le plus grave, c’est bien évidemment l’accident. Chaque année en Europe, 153 000 d’entre eux sont liés à des pneumatiques usés. Parmi eux, 6 % sont mortels. Cela représente près de 10 000 personnes par an… Je ne dis pas ça pour pousser à l’achat, d’ailleurs, si l’on en croit un communiqué de presse publié par Michelin en 2021, « si tous les pneus étaient utilisés jusqu’à la limite d’usure, cela éviterait l’utilisation de 128 millions de pneus par an en Europe ». C’est du gâchis.
Ça va sembler évident à certains, mais il n’est pas forcément inutile non plus de préciser qu’il ne faut pas se risquer à rouler avec deux pneus de marques différentes sur le même essieu. Premièrement c’est interdit par le code de la route, deuxièmement au niveau du comportement routier, c’est comme si vous couriez avec une basket au pied gauche et une tong au pied droit.

Info pneus LDC

En cette période de tension autour du prix des carburants, quel impact sur la consommation peuvent avoir les pneumatiques ?

Une mauvaise pression, par exemple, peut engendrer une surconsommation allant jusqu’à 10 %. De plus, depuis 2012, les pneus sont labellisés et il existe donc différentes classes énergétiques. L’impact sur la consommation de carburant est l’une des catégories prises en compte par ce label européen. Les économies qui peuvent être réalisées ne sont pas forcément énormes, de l’ordre de 0,1 litre aux 100 kilomètres, mais on estime que cela permet quand même d’économiser deux pleins par an. Pas si mal.

Comment peut-on savoir justement si ses pneus sont usés ?

Il faut évidemment regarder le témoin d’usure. La norme internationale est fixée à 1,6 mm de profondeur. Mais franchement si vous atteignez ce seuil, c’est que vous roulez sur des pneus « slick », pour reprendre un terme de Formule 1 ! En réalité, la plupart des professionnels recommandent de changer en dessous de 3 mm pour des pneus été et en dessous de 4 mm pour les pneus hiver.

Et si on n’y connait absolument rien ?

C’est ici que chez CaRool, nous intervenons. Nous avons développé un outil de diagnostic très simple de fonctionnement. Il suffit de photographier ses pneus sous différents angles avec un smartphone. Grâce à ces clichés, nous sommes capables d’indiquer la marque, le type, la date de fabrication et évidemment la référence, qui est généralement la première question qu’on vous pose quand vous souhaitez changer de pneus. Ensuite, nous saurons dire aussi s’ils sont en parfait état, s’il est temps de les remplacer ou s’ils sont totalement usés. Enfin, nous vérifions qu’il n’y a pas d’hernie, que les pneus sont montés dans le bon sens et qu’ils sont bien identiques. Nous compilons toutes ces informations dans un document que nous envoyons par mail… Le conducteur obtient ainsi un « bilan de santé » de ses pneus, à lui de décider après ce qu’il fera.

À la Ligue de Défense des Conducteurs, nous avons testé cet outil de diagnostic. Le résultat est bluffant, nous avons tout appris sur nos pneus et leur degré d’usure. Au point que nous avons décidé de vous offrir ce diagnostic, grâce à la complicité de Jean-Denis Perche et CaRool. En effet, il s’agit d’une démarche qui s’inscrit en droite ligne dans notre volonté de lutter pour une meilleure sécurité routière. Vous vous interrogez sur la santé de vos pneus ? Tout ce que vous avez à faire, c’est cliquer sur ce lien et vous laisser guider. Même pas besoin de télécharger une appli et en plus, c’est complètement gratuit !

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Et la loi Montagne dans tout ça ?

La nouvelle Loi Montagne (voir le détail ci-dessous) impose désormais d’être équipé « hiver » dans certaines régions et ce, du 1er novembre au 31 mars de l’année suivante. Qui est concerné et qu’est-ce que ça implique ? Jean-Denis Perche vous répond.

Pour l’essentiel, les territoires et communes concernés sont situés dans l’Est, le Sud-Est et le Sud-Ouest de la France. Le découpage est assez précis et décidé par les préfets. Concernant l’équipement, tout dépend du lieu d’habitation et de l’usage. Trois cas de figure sont à retenir :

-Vous habitez dans une commune qui figure dans la liste de la loi Montagne : l’idéal c’est d’avoir deux jeux de pneus. C’est un certain investissement mais qui vous permet d’avoir les meilleurs pneumatiques en hiver et en été. C’est d’ailleurs ce qui se fait dans les trois-quarts de l’Europe.

-Vous habitez dans une région qui n’est pas concernée, comme la Bretagne ou la Normandie, et vous vous rendez occasionnellement dans une localité concernée par la loi Montagne. Le compromis peut consister à adopter des pneus toute saison ou 4S (note de la LDC : dans cet article, les journalistes de L’Automobile Magazine rappellent toutefois que ces derniers sont « loin d’offrir les caractéristiques d’un vrai pneu hiver en virage et sur les appuis », donc pensez à adapter votre vitesse !).

-Vous mettez des chaines ou des chaussettes dans votre coffre. Attention, cette option peut s’avérer inconfortable. En effet, vous ne pouvez rouler que dans la neige profonde, leur usage est donc ultra limité. Il ne peut donc s’agir que d’une solution d’appoint.

La loi Montagne en détail

Les obligations d'équipement durant la période hivernale, qui s’étend du 1er novembre au 31 mars de l’année suivante, concernent la quasi-totalité des véhicules en circulation. Cette obligation s’appliquera uniquement dans les départements dits « de montagne » situés dans les massifs mentionnés à l’article 5 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, à savoir : Alpes, Corse, Massif central, Massif jurassien, Pyrénées et Massif vosgien.

Le décret de la Loi Montagne stipule que les véhicules devront être équipés de 4 pneus hiver ou « toutes saisons » ou détenteurs de dispositifs antidérapants permettant d'équiper au moins les 2 roues motrices. Son non-respect n’entrainera pas d’amende avant 2023.