Choqué, en colère, Michel nous a spontanément contactés pour nous raconter comment une voiture-radar privatisée, dont la conductrice s’est endormie au volant, a littéralement pulvérisé son propre véhicule. À la Ligue de Défense des Conducteurs, nous sommes tout aussi choqués : non seulement ce dispositif inutile et fourbe dévoie le principe même de sécurité routière, mais en plus, ce « remède » s’avère plus dangereux que le mal.
« Je venais de regarder mon compteur de vitesse pour m’assurer que je respectais bien la limitation. J’avais même réglé mon limiteur à 77 km/h, sur une départementale à 80 km/h. J’étais sur une belle ligne droite, il faisait beau, tout allait bien. » Dans la voix de Michel, sympathisant de la Ligue de Défense des Conducteurs, l’émotion est palpable. Connaissant notre combat contre les voitures-radars privatisées, il a contacté notre association pour nous raconter son accident avec l’un de ces véhicules, le 20 mai dernier. Très médiatisé, l’événement ne nous avait pas échappé mais le récit de Michel, en direct, glace le sang. « Avec ma femme à mes côtés, notre petite chienne à ses pieds, nous roulions entre Saint-Lô et Coutances, dans la Manche, où nous nous réjouissions de retrouver notre famille. Tout à coup, la voiture qui arrivait en face de nous s’est déportée sur notre file et est venue s’encastrer dans notre Ford Mustang. Je n’ai rien pu faire, elle nous a percutés de plein fouet, impossible de l’éviter ! »
La voiture en question se révèle être un de ces véhicules conduits par des chauffeurs privés, salariés de sociétés à qui l’État délègue la responsabilité de relever des excès de vitesse… sous couvert d’améliorer la sécurité sur les routes. Michel enrage : « La femme qui conduisait est sortie de sa voiture et s’est dirigée vers nous, dans le fossé où on avait fini par s’immobiliser après je ne sais combien de tête-à-queue, pour nous demander si on n’avait pas trop de mal. Tu parles qu’on allait bien ! Nos huit airbags ont explosé, nous sauvant la vie, mais aujourd’hui mon épouse, blessée au cou, porte toujours une minerve et moi, j’ai reçu des débris de verre dans l’œil gauche. J’en suis à ma deuxième opération… Notre petite chienne, enfermée deux jours dans un chenil municipal, le temps qu’on reçoive les premiers soins, est tout aussi traumatisée. Le pire, c’est que cette femme nous a spontanément avoué s’être endormie au volant ! Je suis scandalisé. »
Michel, 75 ans, n’avait jamais eu un accident de sa vie. Sur son permis, douze points. Par le passé, il a même été inspecteur départemental de sécurité routière… Pas complètement le profil du délinquant routier donc. De retour dans le Lot où il réside, notre sympathisant ne lâche pas le morceau. « J’ai évidemment porté plainte, à la gendarmerie de Gourdon. Mais je suis écœuré, car je viens d’apprendre que le procureur de Cahors ne l’avait toujours pas transmise dans la Manche, où a eu lieu l’accident. Je suis non seulement victime d’une voiture-radar privatisée, qui a failli causer notre mort à mon épouse et moi-même, mais en plus, je dois m’accommoder de la lenteur administrative ! Il va quand même falloir que je rachète une voiture… »
Pour s’enquérir de la santé de Michel, côté État, c’est silence radio. « Je n’ai reçu de coup de fil ni du préfet, ni du ministère de l’Intérieur. Le seul qui m’ait appelé, c’est le patron de Mobiom, l’entreprise qui emploie la conductrice de la voiture-radar. Il est confus, mais aussi furieux, parce que j’ai parlé à la presse. Vous pensez bien que je n’allais pas passer mon accident sous silence ! Ce que je constate, c’est que ces véhicules, sur le papier, sont censés renforcer la sécurité routière. Alors qu’en réalité, ce sont de vrais dangers… » Voici qui confirme le témoignage du chauffeur privé « repenti », dans les colonnes du quotidien L’Alsace, en mars dernier. Il y décrivait des véhicules mal entretenus, des conditions de travail exécrables et des comportements poussant les automobilistes à la faute (lire notre coup de gueule sur le sujet en cliquant ici).
« Sensibilisé par les actions de votre association, je connais bien le principe de ces voitures-radars privatisées, termine Michel, qui avait même acheté, en mars dernier, nos vignettes « Non, je ne suis pas une voiture-radar ! ». Je sais qu’elles se mêlent incognito dans la circulation, qu’elles flashent le moindre kilomètre-heure en trop dans les deux sens, sans qu’on s’en aperçoive puisque leurs caméras sont à infrarouge. Le principe m’apparaissait déjà très contestable. Mais avec ce qui nous est arrivé, comptez sur moi pour remuer ciel et terre pour dénoncer ce dispositif qui non seulement n’arrange rien pour la sécurité routière, mais au contraire, fait courir des risques aux conducteurs ! »
La Ligue de Défense des Conducteurs continuera à vous donner des nouvelles de Michel. Face au terrible préjudice auquel il est confronté, nous espérons que la justice ira vite et qu’il sera rapidement indemnisé. Et puis s’il faut encore vous conforter dans l’idée que les voitures-radars privatisées doivent disparaître de nos routes, vous pouvez aussi regarder cette vidéo, signer notre pétition… et nous soutenir.