Pour élaborer son budget 2019, le gouvernement table sur une multiplication par deux du nombre d’infractions enregistrées par les radars automatiques sur les routes dont la vitesse a été réduite à 80 km/h. Une preuve flagrante que cette mesure d’abaissement, contrairement aux affirmations du gouvernement, a bien pour but d’accroître le pactole de répression ! D’autant plus choquant que les revenus de la répression routière sont loin d’être intégralement affectés à des actions de sécurité routière.
C’est écrit noir sur blanc dans un rapport de l’Assemblée nationale sur le Projet de loi de finances pour 2019[1]. Après avoir rappelé la généralisation de la vitesse réglementaire sur route à 80 km/h au lieu de 90 km/h depuis le 1er juillet 2018, ce rapport aborde le surplus de recettes lié à cet abaissement de la vitesse maximale autorisée : « Ce surplus de recettes est estimé à 26 millions d’euros par le Gouvernement, avec une hypothèse d’un doublement du nombre d’infractions enregistrées par les 620 radars fixes et 160 radars mobiles situés sur les routes concernées. » Qui osera encore affirmer que le passage à 80 km/h n’a pas pour but de récupérer encore plus d’argent sur le dos des conducteurs ?
Déjà, juste après le passage à « 80 », le nombre de flashs de radars avait doublé en juillet 2018 par rapport à juillet 2017, et s’est ainsi élevé à 500 000 flashs pour toute la France. Maintenant, preuve est faite que cette multiplication par deux des recettes liées au « 80 » est non seulement amenée à se pérenniser, mais qu’elle était de plus parfaitement préparée par le gouvernement.
Résultat : on sait par avance que le total des amendes de circulation en 2019 devrait avoisiner 1,87 milliard d’euros. Sur cette somme, les radars rapporteront la somme record de près d’1,23 milliard d’euros !
Pire : cet argent de la répression routière n’est pas intégralement affecté à des actions de sécurité routière. En fait, entre 2006 et 2017, c’est-à-dire depuis la création du Compte d’affectation spéciale (CAS) Contrôle de la circulation et du stationnement routiers, seulement 61,7 % de ses recettes ont été affectées à des actions de sécurité routière. Aujourd’hui encore, le produit des PV sert, par exemple, au désendettement de l’Etat. Pourtant le rapport de l’Assemblée nationale cité plus haut rappelle que le renforcement du contrôle par radar découle d’un objectif officiel de réduction du nombre de morts sur les routes. Qu’on juge de l’application concrète de cette intention : pour 2019, les recettes des sanctions routières contribueront pour 452,44 millions d’euros au désendettement de l’Etat… Les enjeux de sécurité routière semblent bien loin.
Le « 80 » est ainsi le symbole d’une politique de répression de la vitesse et des conducteurs qui s’appuie, d’un côté, sur un constant abaissement de la vitesse réglementaire, et de l’autre sur la multiplication et le perfectionnement des radars ; cette politique alimente une hausse continue des recettes de PV qui, loin de financer des actions de sécurité routière, servent à tout autre chose, à commencer par le désendettement de l’Etat.
Face à ce simulacre de sécurité routière, où le facteur vitesse est surexposé, pendant que les réelles causes d’accidents sont négligées, la Ligue de Défense des Conducteurs poursuit son combat contre l’ensemble des dégâts causés par le 80 km/h.
[1] Assemblée nationale, Rapport No 1302 fait au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2019 (no 1255), tome II, Examen de la première partie du projet de loi de finances, conditions générales de l’équilibre financier, par M. Joël GIRAUD, Rapporteur général, Député, 11/10/2018, pp. 887-900, et notamment p. 896.