Pour lutter contre la pollution, de plus en plus de villes s’orientent vers des politiques de restriction de la circulation. Les dernières mesures ouvertement anti-voitures de la capitale poussent ce phénomène jusqu’à la caricature. C’est d’autant plus navrant que d’autres leviers existent pour protéger l’environnement.
Paris, laboratoire des coupeurs de route
À ceux qui croyaient avoir trouvé des itinéraires de substitution après la fermeture des voies sur berges, Anne Hidalgo annonce une avalanche de projets hostiles aux véhicules motorisés, notamment sur les axes est-ouest. Par exemple : création d’une piste cyclable à double sens sur la rue de Rivoli ; installation d’un tramway-bus à double sens, avec voie réservée, sur les quais hauts de la rive droite de la Seine ; fermeture aux voitures d’un kilomètre des quais hauts (entre la place de la Concorde et le pont Royal) ainsi que de la place du Carrousel, près du Louvre. Et cetera.
Pour ceux qui arrivent encore à se frayer un chemin, discrimination par vignette pour savoir qui aura le droit de rouler dans toute la ville. Lors des pics de pollution, ces restrictions de circulation affectent aussi 69 communes autour de la capitale. Et pour ceux qui passent entre les mailles du filet, forte hausse du montant des amendes de stationnement à partir de 2018.
Et comme si la généralisation du 30 km/h d’ici 2020 ne suffisait pas, la dernière idée à la mode est de rendre quasiment piétons les IIIème et IVème arrondissements ! Oui, le centre de la capitale deviendrait une « Zone à trafic limité », essentiellement réservée à l’entre-soi des riverains. Le tout englobé dans un « plan piétons » à 90 millions d’euros ! Rappelons que Paris accueille une circulation qui est à la fois régionale, nationale et internationale. La politique d’obstacles à la circulation crée déjà des dégâts dans la vie quotidienne et professionnelle de nombreux habitants d’Île-de-France. Dès lors, l’ampleur des conséquences économiques de cette obstination rétrograde risque d’être dramatique sur une aire géographique vaste.
Grenoble réfrène son dogme écologiste pour ne pas torpiller l’économie
Comparée à Paris, la très écologiste Métropole de Grenoble fait presque preuve de souplesse.
Côté contraintes : depuis le 1er janvier 2017, pour le transport de marchandises, les camions immatriculés avant octobre 2001 et les véhicules utilitaires légers d’avant octobre 1997 n’ont plus le droit de circuler du lundi au vendredi, de 6h à 19h, dans le centre-ville de Grenoble, qui est devenu une Zone à Circulation Restreinte : pour lutter contre le diesel, les élus grenoblois ciblent les véhicules de livraison toute l’année.
Côté « souplesse » : outre des primes pour changer de véhicule, deux « centres de distribution urbaine » (des entrepôts de logistique) assurent un service payant de réexpédition avec des véhicules dits responsables. Ceux-ci prennent le relais, à l’intérieur de la Zone à Circulation Restreinte, des véhicules de livraison qui n’ont pas le droit de passer. La livraison peut donc aboutir sans que les entreprises soient obligées d’acheter immédiatement des véhicules électriques, GPL, GNV ou essence. C’est mieux que rien, même si c’est absurde et régressif.
Par ailleurs, lors des pics de pollution, c’est à partir du cinquième jour du pic que les véhicules les plus « âgés », y compris ceux des particuliers, sont exclus de toute la métropole grenobloise, à coup de vignettes. Cela fait 4 jours de gagnés sur l’ostracisme. Maigre consolation.
Lyon mise sur la technologie pour réduire embouteillages et pollution
À Lyon et à Villeurbanne, au 25/01/2017, en cas de pollution, c’est encore la circulation alternée qui prévaut mais les véhicules qui disposent de certaines vignettes sont autorisés à circuler : il s’agit des vignettes verte (zéro émission), violette (1), jaune (2) et orange (3).
Plus constructif : à l’aide de capteurs placés dans la chaussée, Lyon pratique la gestion intelligente des feux rouges. Cela permet de réduire le nombre de bouchons et d’améliorer la fluidité de la circulation, ce qui contribue à lutter contre la pollution. Concrètement, comme le nombre de voitures à un endroit donné est connu, il est possible de traiter un embouteillage en laissant certains feux plus longtemps au vert pendant que d’autres restent plus longtemps au rouge. Cette politique, suivie par de plus en plus de grandes villes, témoigne des bons effets d’un usage de la technologie non pas contre mais pour les conducteurs.
Au total, si de plus en plus de villes cèdent à la mode des vignettes et des restrictions de circulation, la capitale semble véritablement enragée contre tout ce qui ressemble à un moteur thermique. Compte tenu de l’onde de choc économique de cette traque, la Ligue de Défense des Conducteurs tire le signal d’alarme face à cet emballement de décisions coupées de la réalité quotidienne des conducteurs. L’entêtement de certaines villes à entraver la circulation au nom de la lutte contre la pollution est d’autant plus triste que d’autres moyens existent pour protéger l’environnement. Par exemple, l’amélioration technique des véhicules offre des pistes intéressantes. Une entreprise développe ainsi un appareil destiné à aspirer les microparticules issues des plaquettes de frein. Par ailleurs, il existe, pour les poids lourds, un frein à induction électromagnétique qui limite les émissions de particules fines. Souhaitons que les politiques de circulation puisent dans l’innovation technique des solutions utiles à tous plutôt que de faciles dispositifs punitifs.