Alors que 2021 se termine, l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (Antai) vient de publier son rapport d’activité pour… 2020. Eh bien croyez-le ou pas, malgré les périodes de confinement qui se sont succédé l’an passé et qui ont bloqué votre voiture au garage, le nombre de contraventions émises a progressé de 2 % par rapport à 2019. Et ce n’est pas tout : d’autres réjouissances sont en gestation.
La crise sanitaire a-t-elle calmé les ardeurs des pro-répression routière ? Vous rêvez ! Au 1er janvier 2021, 4 224 radars en pleine forme, bien remis des dégradations dont ils avaient fait l’objet pendant le mouvement des Gilets jaunes, étaient installés au bord des routes ou dans des voitures dédiées. Soit une progression de 8 % par rapport à 2019, « grâce au renouvellement et à la modernisation d’une grande partie des radars vandalisés en 2018 et 2019 » se félicite l’Antai, sur un ton qu’à la Ligue de Défense des Conducteurs, on trouve carrément provocateur. Pour rappel, la répartition des radars est la suivante : 2 326 radars fixes et tourelles (55 % du parc), 905 radars mobiles (21 %), 744 radars de franchissement (18 %) et 249 radars autonomes (6 %). Soit une réelle inflation de radars fixes, qui ont augmenté de 360 unités !
L’année 2020 a en effet permis à l’État de mettre au rancart bon nombre de radars fixes classiques, au profit de radars tourelles. Plus discrets et placés en hauteur, ces derniers permettent de flasher toujours davantage, tandis qu’ils sont naturellement moins sujets à dégradations. Ce sont 794 radars tourelles qui étaient en place au 1er janvier 2021.
La vitesse plus importante que les feux rouges
L’ensemble des cinémomètres a atteint un « taux de disponibilité » (nombre d’appareils en capacité de fonctionnement par rapport au nombre total de radars) de 82,1 %. Satisfaite, l’Antai met en avant un chiffre « en hausse de près de 8 points par rapport à 2019 (…) sans pour autant retrouver le niveau de 2018 ». Dans le détail, ce sont surtout les radars mobiles qui se sont avérés les plus disponibles : 96,7 % de leur contingent était apte à sanctionner l’an dernier, dont les fameuses voitures-radars conduites par des opérateurs privés (lesquelles, de 40 à la mi-juin 2020, passeront à plus de 400 courant 2022).
À l’opposé, les radars de feux rouges et de franchissement de passages à niveau ont témoigné d’un taux de disponibilité de « seulement » 70,5 %, plus ou moins conforme à celui de 2019. L’État n’accorde clairement pas la priorité aux seuls dispositifs qui sanctionnent des comportements réellement dangereux ! Des « équipements de terrain urbains » devraient toutefois progressivement remplacer les radars de feux entre cette année et l’an prochain, d’après le rapport de l’Antai. Ils permettront de contrôler le respect du feu… mais aussi la vitesse, bien sûr. Sachant que le tout récent vote de la loi de décentralisation 3DS va permettre aux maires et autres présidents de collectivités locales d’installer d’autres radars là où bon leur semble (ce qui, jusqu’à présent, était une prérogative de l’État), en parallèle d’une tendance à généraliser le 30 km/h dans les grandes villes, ça promet de belles recettes à venir !
Les radars ne connaissent pas la crise (sanitaire)
Avec tous ces radars « nationaux », l’Antai a émis 12,9 millions d’avis de contraventions en 2020 au titre du contrôle sanction automatisé. Soit 2 % de plus qu’en 2019, alors même que le nombre de dossiers d’infractions (18,5 millions) recule, lui, de 11 % ! La machine à faire du chiffre s’est tout simplement révélée plus efficace : en effet, ce sont seulement 3 % des photos qui étaient « noires » ou inexploitables en 2020, contre 13 % un an auparavant.
Dotée d’un solide budget de 116 millions d’euros pour l’an prochain, l’Antai annonce dans son rapport d’activité travailler sur des sujets propres à augmenter de manière exponentielle les avis de contravention. Une mission pour laquelle cette agence nationale montre beaucoup d’enthousiasme, dont notre association a bien sûr déjà entendu parler et qui nous préoccupe évidemment beaucoup… Premièrement, les experts de l’agence œuvrent à la mise en place de « nouveaux dispositifs de contrôle automatisé », en lien avec l’instauration des zones à faibles émissions. Il s’agira de sanctionner par caméra les voitures contrevenant aux règles environnementales décrétées par les collectivités locales : la vidéoverbalisation a de beaux jours devant elle.
L’Antai travaille aussi sur le contrôle des voies réservées (bus, covoiturage…), sur des dispositifs de pesage en marche des véhicules de transport de marchandises ou encore sur un radar « bruit » qui devrait concerner tout particulièrement les deux roues au pot d’échappement non règlementaire. Pour ces derniers, il est donc fascinant de constater que l’État, incapable d’imposer un contrôle technique aux deux-roues, préfère les sanctionner plutôt que les vérifier. Le chiffre toujours avant la sécurité !
D’une manière générale, la Ligue de Défense des Conducteurs constate que le renforcement de la répression routière, principalement focalisée sur le contrôle automatisé de la vitesse, demeure le leitmotiv de l’État, bien devant les réformes et améliorations de la formation à la conduite, de la prévention routière. C’est navrant, mais l’analyse de ce rapport d’activité de l’Antai nous incite plus que jamais, grâce à nos 1 million de sympathisants qui nous soutiennent sans faillir, d’appuyer là où ça fait mal… Car non, les radars ne sont pas le remède magique de la sécurité routière !