Les budgets attribués aux forces de police et de gendarmerie pour 2015 viennent d’être présentés à l’Assemblée nationale. Alors que les forces de l’ordre sont confrontées à un manque drastique de moyens, l’Etat continue de dépenser des sommes folles pour installer de nouveaux radars.
Crédit Creative Commons Francisco Gonzales
201 006 euros : voici le coût moyen, à l’unité, d’un "radar chantier". Ce nouveau type de radar, imaginé par les services du ministère de l’Intérieur, devrait faire son apparition sur nos routes l’année prochaine. Censé être installé aux abords des zones en travaux, il pourra en fait être installé sur n’importe quelle « zone de danger »…autrement dit, partout ! Et ce, bien sur, sans panneau avertisseur : de quoi piéger très efficacement tous les conducteurs qui auront le malheur de croiser son chemin.
200 000 euros pour un radar
Pour chaque exemplaire de ce « Robocop à flashs », comme le surnomme la presse, le gouvernement va donc débourser plus de 200 000 euros, soit 8,6 millions d’euros rien que pour les 43 machines qui doivent être installées l’an prochain. Sans compter la maintenance : presque 29 000 euros par an et par machine…
Les coûts des autres radars sont tout aussi exorbitants :
-167 500 euros pour chaque radar tronçon, ceux qui surveillent votre vitesse sur des distances allant maintenant jusqu’à 17 km !
-52 800 euros par radar mobile embarqué, installé dans ces voitures banalisées qui vous flashent en toute discrétion, quand vous les doublez ou quand vous les croisez.
-50 700 euros pour un radar discriminant, qui arrive à distinguer quel véhicule est en excès de vitesse sur une route à plusieurs voies, et qui distingue également les camions des voitures.
Cette armada de nouveaux appareils, toujours plus sophistiqués, ne permet pas de sauver des vies sur les routes et n’a en réalité qu’un seul but : racketter les conducteurs encore plus efficacement !
Des voitures de police bonnes pour la casse
Le plus inquiétant, c’est que pendant que l’Etat va continuer de dépenser des millions l'an prochain (lire ici le projet de loi de finances 2015) pour sa politique du tout-radars injuste et inutile, les forces de l’ordre n’ont même plus les moyens de renouveler leur parc automobile.
Selon un rapport du député PS Yann Galut publié au mois d’octobre, la police dispose ainsi d’un budget annuel de 30 millions d’euros, soit à peine plus que celui destiné aux nouveaux radars, pour l’achat de ses nouveaux véhicules, alors qu’il lui faudrait 136 millions pour renouveler un parc hors d’âge. « Il ne serait pas rare que des véhicules ayant entre 200 000 et 300 000 kilomètres continuent d'être utilisés », ajoute Yann Galut dans son rapport. Le contrôle technique, imposé à tous les Français, ne serait-il pas valable pour nos forces de l’ordre ?
Alors que 10.896 véhicules auraient dû être remplacés entre 2015 et 2017, seuls 4100 pourront effectivement l'être au vu des budgets accordés. Et la situation n’est pas meilleure dans la gendarmerie, où 6.800 voitures et camionnettes auraient dues être remplacées en 2015, ce qui n’a pas été prévu.
Visiblement, les courses-poursuites avec des délinquants en voitures de sport risquent de rester encore longtemps dans le domaine de la fiction…
« À Marseille, les agents de la brigade anti-criminalité (BAC) ont insisté sur l’ancienneté des véhicules mis à leur disposition (tous ont parcouru plus de 150 000 kilomètres) et le caractère récurrent des incidents mécaniques. En Seine-Saint-Denis, les agents de la BAC ont fait remarquer que les véhicules, plus récents, contenaient difficilement l’ensemble du matériel à embarquer lors des patrouilles… », confirme le rapport d’information parlementaire sur la lutte contre l’insécurité du député PS Jean-Pierre Blazy, daté lui aussi du mois d’octobre, et ce « alors même que la mobilité des policiers (comme des gendarmes) constitue un enjeu essentiel pour la sécurité de nos concitoyens », souligne ce même rapport.
9 000 policiers et gendarmes en moins en trois ans
Plus grave encore, la diminution des moyens alloués aux forces de l’ordre ne s’arrête pas au parc automobile : selon le rapport Blazy, 9 269 emplois équivalents temps plein (ETP) ont été supprimés dans la police nationale et la gendarmerie entre 2009 et 2012. Et si la saignée s’est interrompue depuis, seuls 885 postes ont été créés pour les années 2013 et 2014. Pas de quoi compenser, loin de là, les suppressions des années précédentes.
Au total, les directions départementales de la sécurité publique (DDSP), interrogées par les auteurs du rapport, estiment qu’il leur faudrait environ 20 % de crédits de fonctionnement en plus pour pouvoir assurer correctement leurs missions. Quant à la gendarmerie, des directives y sont carrément données pour réduire la consommation de carburant…
Comment alors s’étonner de la hausse de la délinquance ? Au lieu de rester enfermé dans son dogme du tout-répressif et du tout-radars, le gouvernement ferait mieux d’affecter ces sommes à des investissements permettant réellement d’assurer notre sécurité.
Comme déjà plus de 270 000 Français, vous pouvez vous aussi vous opposer aux nouvelles mesures répressives du gouvernement en signant la pétition de la Ligue de Défense des Conducteurs.