Couplée à l'application GECO-Air, la vignette Cirt'Air instaurée pour restreindre la circulation aux véhicules les moins polluants pourrait devenir un nouvel outil de sanction pour les conducteurs peu adeptes de l'éco-conduite.
L’Institut Français du Pétrole et des Energies Nouvelles (IFPEN) a créé une vignette automobile connectée. Reliée à l’application « GECO-Air », celle-ci a pour objet d’évaluer le style de conduite d’une personne et, partant, son niveau de consommation de carburant et donc d’émission de polluants. Le risque est que ce moyen d’évaluation et de conseil soit demain associé à un projet de verbalisation à distance via la vignette Crit’air, sur un motif de pollution. Cela transformerait cet autocollant en un outil d’exclusion et de taxation.
Quand un autocollant devient un outil de notation instantanée du citoyen
La vignette connectée de l’IFPEN, organisme financé en partie par l’Etat, sera déployée en 2018. Elle a pour vocation d’évaluer la manière de conduire de quelqu’un au moyen d’une application de téléphone portable. Si la conduite s’écarte d’un modèle donné, elle sera jugée comme agressive, consommatrice et polluante. La note (de A à F) du véhicule sera alors modifiée. La couleur de la vignette pourrait même changer, ce qui faciliterait d’éventuelles sanctions. Conçue dans une optique de conseil, cette technologie pourrait donner lieu à des développements plus directifs.
Si elle était demain combinée à l’application GECO-Air, la vignette Crit’Air pourrait transmettre aux autorités des informations individuelles sur la façon dont tel véhicule circule ou stationne.
Si vous doutez de pareille hypothèse, lisez cette intervention d’Anne Hidalgo : « Reste à se doter d’un dispositif qui permettra d’identifier à distance le niveau de pollution des véhicules et de verbaliser par la même occasion ceux qui ne sont pas autorisés à circuler. Cette proposition que je soutiens a reçu un bon accueil de l’Etat. » (Le Parisien, 01/10/2017)
Ce nouvel outil de répression pourrait alors enclencher une pluie de contraventions à l’encontre des conducteurs dont les véhicules dépasseraient les normes de pollution, voire les objectifs de notation environnementale de telle ou telle ville.
L’Etat et les communes pourraient alors être très intéressés par ce qui ressemble à une nouvelle manne financière en accroissant le contrôle du non-port de la vignette ou non-respect de la réglementation.
Instaurée pour filtrer la circulation des véhicules sur la base des émissions de polluants, la vignette Crit’Air permettrait, dans ce cas de figure, d’intensifier le contrôle des pouvoirs publics en supervisant et contraignant le style de conduite du conducteur.
Défendons le discernement du conducteur
Or, un des fondamentaux de la conduite est la perception de l’environnement par le conducteur. En ville, notamment, par souci de sécurité ou de fluidité de la circulation, il doit en permanence accélérer, freiner ou changer de voie, par exemple. On avait déjà obligé les conducteurs, au nom du dogme anti-vitesse à conduire les yeux rivés sur le compteur. S'ils doivent en plus, au nom du dogme anti-pollution, surveiller le niveau de consommation en temps réel de leur véhicule, il est à craindre que cela sonne le glas d'un élément crucial pour la sécurité de tous, surtout en ville : l'attention et l'anticipation.
La Ligue de Défense des Conducteurs met donc vigoureusement en garde contre ces velléités de contrôle-taxation du style de conduite. Au-delà du caractère de plus en intrusif et liberticide des contrôles sur les conducteurs, ce nouveau type de répression pourrait constituer un nouvel élément de détérioration de la sécurité routière.