Alors que le bilan en matière de sécurité routière de l'abaissement de la vitesse à 80 km/h reste volontairement tenu secret par le Délégué interministériel à la sécurité routière, les conséquences d'une généralisation de cet abaissement à l'ensemble du réseau secondaire, elles, sont déjà connues : 4 fois plus de flashs, un coût considérable pour changer tous les panneaux de limitation de vitesse, et le tout pour une mesure qui risque d'augmenter les accidents au lieu de les diminuer !
Des radars qui flashent 4 fois plus à 80 km/h
À l’image des périphériques parisien et rennais qui démontrent que baisser la vitesse permet de faire fructifier la tirelire de l’Etat, sur les trois tronçons concernés par l’expérimentation du 80 km/h, les quatre radars fixes ont vu leur nombre de flashs exploser, avec 4,25 fois plus de flashs en 2016 qu’en 2014, année complète avant la mise en place de cette mesure mi-2015. Des chiffres d'autant plus impressionnants qu'ils ne prennent pas en compte les radars mobiles et les radars chantiers pourtant très efficaces pour améliorer les recettes de l’Etat !
Sur la RN 57, en Haute-Saône, le radar situé sur les 14 kilomètres d’expérimentation a flashé 2 109 fois en 2016 contre 573 en 2014, soit 3,5 fois plus. Sur la RN 151, entre l’Yonne et la Nièvre, le nombre de flashs du radar situé sur la commune de Merry-Sec est passé de 161 à 930, soit 5,8 fois plus ! Sur la RN 7, dans la Drôme, les 18 kilomètres d’expérimentation sont étroitement surveillés par deux radars. Le premier, situé à La Roche de Glun a connu une activité photographique 3,5 fois plus élevée en 2016 qu’en 2014, 2 149 flashs contre 624 avant la baisse à 80 km/h. Le second radar, situé sur la commune de Chateauneuf-sur-Isère a lui enregistré 9 855 flashs en 2016 contre 2 352 en 2014, soit 4,2 fois plus !
Ces quatre radars à eux seuls, ont permis une augmentation des recettes de plus de 500 000 euros sur cette période. En extrapolant ces résultats, avec environ 1 000 radars fixes situés sur des axes qui pourraient passer à 80 km/h, en cas de généralisation du dispositif, les recettes pour l’Etat devraient augmenter de 500 millions d’euros… Et ce sans compter la volonté des autorités de déployer les itinéraires leurres et les voitures radars privatisées !
Un coût non négligeable pour le changement des panneaux
Si malheureusement depuis plusieurs années les budgets alloués à l’entretien des routes sont en baisse, les sommes qui seront engagées pour changer tous les panneaux de limitation de vitesse à 80 km/h risquent fort d'être investies une nouvelle fois au détriment de la sécurité des usagers de la route. En effet, presque 400 000 kilomètres de routes pourraient être concernées par ce changement. Sur la RN 151 par exemple, les 32 kilomètres d’expérimentation comprenaient 67 panneaux. D’un coût de 80 euros l’unité, le changement de milliers de panneaux risque fort de peser sur les budgets des collectivités locales et donc sur l’entretien et la qualité du réseau routier.
Un bilan des accidents introuvable
Si la généralisation de l'abaissement à 80 km/h sur le réseau secondaire engendrera donc indéniablement une hausse des flashs des radars et un budget considérable pour le remplacement des panneaux, aucune information concernant l’accidentalité sur les tronçons concernés par l'expérimentation menée depuis deux ans n'a pour l'heure été délivrée. Le gouvernement précédent avait pourtant annoncé qu’un premier bilan serait effectué fin décembre 2015, après les six premiers mois d’expérimentation. Or, pour l'heure, c'est silence radio et aucun bilan. Le Délégué interministériel se gausse même de bons résultats mais refuse de les rendre publics. De qui se moque-t-on ? Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’Intérieur avait pourtant déclaré le 11 mai 2015, devant le Conseil National de la Sécurité Routière : « cette expérimentation sera transparente, honnête et rigoureuse ». On en est loin !
Un silence qui interroge sur l'efficacité de la mesure, d'autant que pour l'heure, la seule donnée connue laisse supposer au contraire un impact nul, voire négatif : entre juillet 2015 et juillet 2016, l’expérimentation à 80 km/h sur la RN 151 n’a pas fait chuter le nombre d’accidents, bien au contraire : 4 accidents ont même été déplorés contre 3 l’année précédente !
Et la mesure, loin d’améliorer la sécurité routière, risque au contraire de provoquer plus d’accidents. En effet, les poids lourds étant eux-mêmes limités à 80 km/h, les dépassements vont devenir beaucoup plus difficiles et dangereux. En outre, en roulant plus lentement, les risques de somnolence ou d’utilisation du smartphone sont plus élevés.
En 2014, la forte mobilisation de la Ligue de Défense des Conducteurs, en rassemblant 1,5 million de signataires, avait permis de faire reculer le gouvernement sur la généralisation de cette mesure. Le projet avait été transformé en test sur ces trois tronçons. Aujourd’hui, pour s’opposer à cette mesure qui va impacter des millions de conducteurs, les usagers de la route doivent être encore plus nombreux à signer la pétition « Non à la baisse des limitations de vitesse » pour montrer au gouvernement leur refus de cet abaissement généralisé de la vitesse.