La métropole de Bordeaux a convié notre association à se joindre à son processus de mise en place d’une Zone à faibles émissions (ZFE). Vous le savez, nous sommes très au fait de l’impact social de ces futures zones de restriction de circulation. Nous ne pouvions donc refuser de participer à cette démarche de concertation... Dommage, lors de la deuxième session du 21 juin 2022, les élus concernés étaient toujours aux abonnés absents.
Dans sa volonté d’englober tous les enjeux socio-économiques et les conséquences sur la mobilité que soulève l’obligation d’instaurer une Zone à faibles émissions, la métropole de Bordeaux poursuit sa phase de concertation. Après une première réunion balbutiante, dont le but était de poser les bases (lire ici), nous attendions plus de cette deuxième rencontre.
Il faut dire que la session précédente avait cruellement mis en lumière le chemin qui reste à parcourir pour parvenir à la mise en place de la ZFE. C’est bien simple, à part le périmètre (les quatorze communes situées à l’intérieur de l’intra-rocade) et la date butoir du 1er janvier 2025, qui sont d’ores et déjà définis, le type de véhicules concernés, le niveau d’interdiction et la progressivité des mesures ou les types d’accompagnement et de dérogations ne sont toujours pas arbitrés.
ZFE, une question de point de vue
Pour cette deuxième consultation, nous étions cette fois-ci réunis au sein de la Grande Poste, dans le centre de Bordeaux. Plusieurs tables rondes accueillaient la soixantaine de participants, issus de milieux professionnels et associatifs, dont la Ligue de Défense des Conducteurs donc. Au programme, un temps d’échange dont l’objectif annoncé était d’identifier les différents profils d’usagers concernés par le déploiement de la Zones à faibles émissions, et de réfléchir à des propositions de dérogations et d’accompagnements.
Nous voici donc assis à notre table en compagnie de représentants de diverses structures, mais n’ayant pas toutes le même intérêt à la mise en place de ce dispositif : le réseau d’autopartage Citiz, la régie métropolitaine de stationnement Metpark, ou encore l’opérateur de vélos libre-service Cykleo, filiale de Keolis, ne voient pas cette ZFE d’un mauvais œil, puisqu’ils y décèlent une opportunité d’accélérer leur développement. À l’inverse, GERTRUDE Saem, société d’ingénierie des déplacements, le syndicat des métiers de la distribution et des services de l'automobile Mobilians (ex-CNPA) et la Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV) sont, comme notre association, bien plus inquiets et réservés sur les conséquences, notamment sociales, de ce dispositif.
Dialogue de sourds ?
Normal, chacun prêche pour sa paroisse, nous éloignant de l’objectif initial. La représentante de Cykleo, par exemple, pour qui même un remplacement total du parc automobile thermique par des véhicules 100 % électriques ne suffirait pas, préfère arguer que la solution passe par beaucoup plus de vélos… Le représentant du réseau Citiz, lui, préconise de favoriser l’autopartage de véhicules en libre-service au sein de la ZFE comme mesure d’accompagnement. Étonnant n’est-ce pas ? De notre côté, à la Ligue de Défense des Conducteurs, vous savez que nous militons pour la liberté de circuler, prônant notamment le renouvellement naturel du parc automobile, le mix technologique et en aucun cas la solution unique du 100 % électrique.
Saluons toutefois ce processus démocratique, consistant à nous mettre en présence les uns des autres, à écouter les arguments de chacun. Bien sûr qu’autour de la table, nous n’avons pas tous la même perception de cette future Zone à faibles émissions, mais ce dialogue est le seul moyen de prendre conscience des attentes de tous.
Aucun élu présent !
Toutefois, ne nous voilons pas la face, nous sommes parvenus à peu d’avancées concrètes au bout de ces deux heures de réunion. En même temps, quand dès le préambule, il est annoncé que les arbitrages seront l’affaire des élus… et que ces derniers ne sont pas là, on a vite compris qu’il n’y aurait finalement pas grand-chose à en attendre. Car une fois de plus, hormis une allocution d’à peine cinq minutes en introduction de la séance de Claudine Bichet, vice-présidente de Bordeaux Métropole au climat, à la transition énergétique et à la santé, aucun édile des communes concernées, aucun autre élu métropolitain, n’était présent. Certes, ils recevront un résumé des points de vue que les parties prenantes ont exprimés, mais comment être sûrs qu’ils se sentent effectivement concernés ?
À la Ligue de Défense des Conducteurs, on espère donc vivement que ce processus - une troisième réunion aura lieu à la rentrée et une phase de concertation avec les habitants est prévue à partir de septembre et jusqu’à la fin de l’année 2022 - n’est pas un moyen pour Bordeaux Métropole de se donner bonne conscience pour finalement prendre ses décisions en catimini. Le but ne doit pas être non plus de mâcher le travail aux élus en vue de leurs arbitrages, mais de réfléchir ensemble. Or pour l’instant, ils brillent plutôt par leur absence.